Les préoccupations pour la santé et l’environnement face aux risques des pesticides se font de plus en plus fortes dans le monde scientifique et médical, mais aussi pour la population française. Des réponses politiques se dessinent. Près de 1 200 médecins ont signé un appel, présenté au Sénat le 30 janvier dernier, pour mettre en garde contre la dangerosité des pesticides. Dans un même temps, l’Assemblée nationale a accueilli un colloque sur le thème « Pesticides : santé et biodiversité ». Lors de son discours d’ouverture, le ministre de l’Ecologie, Philippe Martin, a affiché sa détermination à agir contre l’usage de ces produits dont les impacts sanitaires sont de plus en plus relevés par les études scientifiques. « Nos connaissances dans ce domaine se sont sensiblement accrues au cours des dernières années, et ce savoir nous oblige à reconsidérer certaines de nos pratiques , a-t-il reconnu.
Les preuves du danger s’accumulent
Dans leur appel, les médecins soulignent que les pesticides sont impliqués dans nombre de pathologies, comme certains troubles neurologiques, la maladie de Parkinson, le cancer de la prostate et certains cancers du sang, notamment dans le cadre des expositions professionnelles chez les agriculteurs. Il existe également des risques de malformations congénitales augmentés chez les enfants des femmes exposées aux pesticides pendant leur grossesse. Ces effets ont été confirmés par une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Iserm) publiée en juin 2013. Un rapport du ministère de l’Agriculture, publié fin 2013, a également montré que la sécurité sanitaire des aliments est menacée : près de 12% des fruits et légumes contiennent des résidus de pesticides à des taux supérieurs aux seuils réglementaires. Les médecins ont aussi relevé que « personne ne conteste l’imprégnation générale de la population » par les pesticides « à faibles doses ». Un constat déjà posé pour l’Ile-de-France il y a quelques années par Airparif, qui montrait que l’air de la capitale était contaminé par une trentaine de substances.
De plus en plus de mesures pour limiter l’usage de ces produits
Dans leur appel, les médecins demandent au gouvernement de mettre fin aux dérogations à l’interdiction des épandages aériens, de reconnaître les nouvelles maladies professionnelles agricoles liées aux pesticides, de mettre en place un meilleur étiquetage des produits destinés à l’alimentation et de confier à des laboratoires indépendants la réalisation des tests nécessaires pour l’autorisation de mise sur le marché des pesticides. Dans sa réponse, le ministre de l’Ecologie a annoncé l’application de la redevance maximale payée sur les produits phytosanitaires à quarante nouveaux produits, ce qui devrait générer 30 millions d’euros de recettes supplémentaires, le développement de solutions alternatives aux épandages aériens et un prochain plan de lutte contre les perturbateurs endocriniens.
Dernièrement, des avancées législatives ont été réalisées dans la lutte contre les pesticides. Le Parlement a adopté, en janvier, une proposition de loi écologiste qui interdit en France les produits phytosanitaires (insecticides, herbicides, fongicides, etc.) dans les espaces verts publics dès 2020 et dans les jardins particuliers à compter de 2022. La loi d’avenir pour l’agriculture, votée mi-janvier en première lecture à l’Assemblée nationale et qui doit être débattue au Sénat au printemps, prévoit le transfert du pouvoir d’autorisation de mise sur le marché des pesticides du ministère de l’Agriculture à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Une mesure qui vise à limiter les pressions exercées par les industriels.