Un avis du Conseil économique social et environnemental (Cese) appelle à renforcer les dispositifs d’éducation affective, relationnelle et sexuelle auprès des enfants et adolescents, alors que plusieurs indicateurs suggèrent de nombreux manquements aux politiques déjà en place et une hausse des comportements à risques.
Seuls 15 % des élèves ont droit à des cours d’éducation sexuelle en France. C’est pourtant un devoir pour l’ensemble des établissements scolaires du territoire. Ce chiffre avancé par le Cese dans un avis émis la semaine dernière concerne « l’Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle » (Evars).
Au même moment, une étude menée par les Nations unies dévoile que les jeunes européens utilisent moins de préservatifs que les générations précédentes. Menée sur près de 250 000 jeunes, l’étude révèle qu’entre 2014 et 2022, « le pourcentage d’adolescents ayant utilisé un préservatif lors de leur dernier rapport sexuel est passé de 70 % à 61 % chez les garçons et de 63 % à 57 % chez les filles. » De plus, de récentes études démontrent une hausse des infections sexuellement transmissibles. Face à ces chiffres, le Cese appelle à un sursaut de la part des établissements scolaires et des structures associatives.
Faire appliquer la loi
La France s’est pourtant déjà attaquée à la question il y a plusieurs décennies. Une loi de 2001 impose en effet trois heures d’éducation sexuelle chaque année à tous les élèves, du primaire au lycée. Mais près d’un quart de siècle plus tard, le dispositif est encore loin de remplir son rôle : 15 % d’élèves ne participent pas aux trois heures de cours prescrites et 25 % des établissements ne proposent aucun cours du tout.
Le Cese parle d’« un impératif de société, […] face à des conséquences sociales, sanitaires et financières importantes, et à une demande croissante de la part des jeunes générations. » Le plan proposé a ainsi pour but de « promouvoir les relations affectives saines, l’impératif de consentement, la reconnaissance des orientations sexuelles et des minorités de genre et la lutte contre les inégalités. »
Lever un tabou
L’institution veut aussi faire de ce plan une occasion de lutter contre la « culture de l’infantisme » ancrée dans notre société. « Ce sujet questionne profondément notre rapport à l’enfant dans nos sociétés, et aux différents systèmes de domination auquel il est soumis » résume l’institution.
Car au-delà de simples cours pour protéger les adolescents de grossesses non-désirées et d’infections sexuellement transmissibles (IST), l’Evars est aussi un moyen de sensibiliser les mineurs aux violences sexuelles. « Une éducation à la sexualité n’éviterait certes pas tous les drames mais plus un ou une enfant est informée des interdits touchant à l’intégrité de son corps, plus la société dans son ensemble est sensibilisée au respect d’autrui, et plus les risques de violences sexuelles sont susceptibles de diminuer, estime le rapport. Or l’éducation telle qu’elle est conçue en France est plus encline à apprendre aux enfants à obéir aux adultes qu’à questionner leurs injonctions et gagner en autonomie. »
Ce dispositif renforcé permettrait ainsi de repérer plus facilement les enfants victimes d’abus. L’Evars s’affirme par ailleurs comme un « point de convergence » entre droits de l’enfant et droits des femmes, puisqu’il « déconstruit les stéréotypes et les normes sociales inégalitaires entre les individus. »
De la prévention partout
Pour développer au mieux cette politique d’éducation et toucher le plus grand nombre, le Cese préconise d’investir « tous les lieux qui accueillent des enfants » en « impliquant un grand nombre d’administrations, et au premier chef le ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse. »
Concrètement, l’institution propose un plan de formation, la désignation d’un référent dans chaque structure recevant du public, la mise en place de modules d’« éducation aux compétences psychosociales et à l’égalité » et le financement d’associations volontaires. Enfin, le rapport évoque également un volet répressif avec « la création d’une incrimination pénale sanctionnant l’entrave au droit des enfants à bénéficier d’une Evars. »
© C i E M / Mathieu Yerle