La Mutualité française propose des solutions concrètes pour renforcer l’accès aux soins. Dans un contexte où les inégalités en santé se creusent, ces recommandations visent à repenser notre système de santé pour une « protection sociale plus équitable et efficace ».
Alors que le nouveau gouvernement vient de prendre ses fonctions, la Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF) alerte sur la nécessité d’une refonte de notre modèle de santé et de protection sociale. Elle a identifié quatre priorités essentielles à mettre en œuvre pour assurer un accès équitable aux soins et une meilleure protection des assurés sociaux.
Mieux soigner et moins dépenser
Selon les résultats des comptes de santé en 2022 de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Dress),les dépenses de santé en France atteignent 313,6 milliards d’euros, un chiffre qui augmente deux fois plus vite que la richesse nationale. Par conséquent, plus de 75 % des Français craignent que le déficit de la Sécurité sociale ne compromette son avenir. Alors pour éviter des « mesures de rabot » et des déremboursements qui pourraient pénaliser les plus vulnérables, la Mutualité française plaide pour une évolution des pratiques médicales.
Elle préconise de réaliser des économies significatives, rappelant le gaspillage d’environ 50 milliards d’euros chaque année pour cause de soins inadaptés. « Plus de 263 000 séjours hospitaliers pourraient être évités chaque année et les surprescriptions et les actes médicaux redondants représentent un potentiel d’économie évalué entre 15 et 20 milliards d’euros », indique-t-elle dans son communiqué.
Pour limiter ces pratiques coûteuses, la FNMF soutient la généralisation du dossier médical partagé. Cet outil a déjà activé par 11 millions de patients via Mon espace santé. Elle défend également les bonnes pratiques de prescriptions et recommande « d’éviter la multiplication d’actes redondants, notamment en imagerie et biologie ».
Lutter contre les déserts médicaux
Aujourd’hui, près de 90 % des Français vivent dans des zones considérées comme des déserts médicaux. De plus, 6 millions de patients ne disposent pas de médecin traitant. Pour remédier à cette situation alarmante, la Mutualité française propose de s’appuyer sur la complémentarité entre les professionnels de santé. Elle suggère une modification du parcours de soins, actuellement centré autour du médecin traitant. Elle propose ainsi la création d’« équipes de soins traitantes », intégrant médecins, assistants médicaux, infirmiers et autres professionnels de santé.
Cette approche collaborative permettrait selon elle d’organiser plus efficacement la prise en charge des patients, en s’appuyant sur les compétences de chacun. Une telle initiative est d’autant plus nécessaire que 62 % des Français ont dû renoncer à des soins en raison de délais d’attente trop longs.
La prévention au cœur des actions
La prévention est essentielle pour alléger la pression sur notre système de santé. 84 % des Français estiment en effet qu’il faut intensifier les actions de prévention pour limiter les problèmes de santé mentale. En favorisant le diagnostic précoce et en améliorant les comportements, la Mutualité française souhaite ainsi diminuer les coûts liés à la santé, mais également réduire les inégalités.
Pour cela, elle suggère une meilleure utilisation des données des patients afin de proposer des actions de prévention ciblées. Et pour plus d’efficacité, la FNMF appelle à un assouplissement de la réglementation des données régie par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Elle appelle également à reconnaître la prévention comme une « prestation de santé à part entière ». Elle rappelle à ce titre que « les services de prévention déployés par les mutuelles ne sont pas considérés comme des prestations et donc s’imputent dans leurs frais de gestion ».
Perte d’autonomie : pour la généralisation d’une couverture dépendance
C’est un fait, la population vieillit. Et pourtant, selon un sondage datant de septembre 2024, 71 % des Français se déclarent financièrement mal préparés à faire face à la dépendance (à ce sujet, lire notre article Toutes les solutions pour bien vieillir à la maison). C’est 5 points de plus qu’en 2023. Pour répondre à cette urgence, la Mutualité française propose de généraliser la couverture dépendance et de l’adosser à la complémentaire santé. En pratique, pour un coût variant entre 10 et 20 euros par mois selon l’âge du cotisant, une rente mensuelle lui serait versée en cas de dépendance lourde. Une mesure qui permettrait d’offrir une aide précieuse aux familles et aux aidants en difficulté financière, sans influer sur les finances publiques.
Un appel à l’action collective
Dans le communiqué, Éric Chenut, président de la Fédération nationale Mutualité française, souligne l’importance d’une mobilisation collective pour réformer notre système de santé. Rappelant que les inégalités en santé se creusent dans les territoires, il appelle le nouveau gouvernement à agir : « La santé est un bien commun à protéger, qui doit échapper aux logiques purement lucratives, lesquelles compromettent les fondements d’une santé équitable, solidaire et accessible à tous. »
Séverine Salgado, directrice générale de la Mutualité française, souligne de son côté la nécessité d’une approche budgétaire pluriannuelle pour assurer la cohérence des politiques de santé. Cette dernière appelle également à une réflexion collective. « Les décisions doivent être co-construites avec tous les acteurs, y compris les professionnels de santé, les patients et les collectivités territoriales, afin de définir des objectifs communs », déclare-t-elle.
Alors que s’ouvre le débat sur le budget de la Sécurité sociale, la Mutualité française espère que son appel sera entendu.
© C i E M / Constance Périn