Le vent, la houle, les courants, les marées, la température de l’eau… sont autant de ressources fournies par le milieu marin qui peuvent être utilisées pour produire une électricité renouvelable. Si les perspectives de développement de ces technologies vertes sont intéressantes, celles-ci sont encore au stade de l’expérimentation ou du projet en France.
L es énergies renouvelables ne représentent que 20 % de la production d’électricité au niveau mondial et, parmi elles, les énergies marines renouvelables (EMR) seulement 0,01 %. L’Europe produit à elle seule 90 % des EMR. La Grande-Bretagne, le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suède en sont les leaders. En France, la filière représente plus de 3 000 emplois en 2019, selon le rapport de l’Observatoire des énergies de la mer publié le 30 juin 2020. Par ailleurs, 452 millions d’euros ont été investis cette même année, soit une hausse de 70 % par rapport à 2018, preuve de l’intérêt croissant porté à la filière. Il faut dire que les EMR comprennent plusieurs types de technologies, avec des perspectives de développement à plus ou moins long terme, qui utilisent les forces ou les ressources du milieu marin.
Des technologies très différentes
Il existe ainsi différentes sortes de technologies marines. L’éolien, qui utilise l’énergie du vent, est le plus connu et le plus répandu dans le monde. Implantées offshore (littéralement « au large »), les éoliennes sont installées en mer, à plus de 10 kilomètres des côtes, et sont raccordées au réseau électrique par un câble sous-marin. Elles fonctionnent de la même manière que les éoliennes terrestres, mais on estime qu’elles permettent de produire jusqu’à 60 % d’énergie en plus, car les vents y sont plus forts et réguliers, mais aussi parce que leurs turbines sont généralement plus puissantes.
L’hydrolien se sert quant à lui de l’énergie des courants de marée avec une sorte d’éolienne sous-marine. « Plus le courant est fort, plus l’énergie produite sera importante, explique le ministère de l’Écologie sur son site Internet. La côte nord-ouest de la France, où les courants sont particulièrement puissants, est propice au développement de cette énergie. »
Autre technologie, l’énergie marémotrice consiste à profiter du flux et du reflux de la marée pour remplir ou vider un bassin de retenue. Le va-et-vient de l’eau actionne alors des turbines qui sont incorporées dans ce barrage, et qui entraînent à leur tour un générateur d’électricité.
Le houlomoteur utilise l’énergie de la houle, c’est-à-dire des vagues successives créées par le vent à la surface de l’eau. Il existe différents dispositifs pour l’exploiter : ce peut être une chaîne flottante qui suit les mouvements de l’eau et entraîne une turbine ou, par exemple, une paroi oscillante immergée qui actionne des pompes.
Enfin, l’énergie thermique exploite la différence de température entre les eaux chaudes de la surface et les eaux froides en profondeur. Cette technique est « particulièrement adaptée dans les départements d’outre-mer où les gradients de températures […] sont plus importants qu’en métropole », précise le ministère de l’Écologie.
La France est en retard
« La France dispose d’un fort potentiel de développement pour ces technologies, compte tenu des atouts naturels de son territoire (11 millions de km2 d’eaux sous sa juridiction), considère le ministère. La ressource connue, estimée entre 2 000 et 3 000 mégawatts, est concentrée majoritairement au large des côtes de Normandie, de Bretagne et des Pays de la Loire, et des opportunités sont aussi à saisir dans les territoires d’outre-mer et dans les régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d’Azur. » Toutefois, ces dernières années, les projets patinent.
« Nous sommes très en retard par rapport à nos voisins européens, alors même que la France est le deuxième espace maritime mondial », affirme Corinne Lepage, avocate et ancienne ministre de l’Environnement. « Il existe une très forte opposition aux projets de fermes éoliennes en mer, notamment, poursuit-elle. Les marins-pêcheurs s’inquiètent pour leur activité, et les riverains, les communes et les associations de sauvegarde du patrimoine n’en veulent pas dans leur paysage. » Implantées à plusieurs kilomètres de la côte, les installations offshore sont pourtant peu visibles depuis le bord de mer. « Les recours juridiques sont nombreux et ralentissent le développement des EMR, constate Corinne Lepage. Mais cette situation n’est pas nouvelle, car ces difficultés sont les mêmes pour les projets d’éolien terrestre. Il existe aussi une addiction au nucléaire en France qui n’est pas près de disparaître. D’ailleurs, dans son interview donnée lors du 14-Juillet, le président de la République n’a pas du tout abordé le thème des énergies renouvelables, c’est significatif. Dans son plan de relance, il a certes abordé l’investissement dans la filière hydrogène, mais sans préciser s’il s’agira d’une énergie « verte » renouvelable ou d’une énergie « grise » issue des combustibles fossiles. » Mais l’ancienne ministre ne baisse pas les bras et continue de défendre le développement des EMR en prenant exemple sur l’Allemagne, « qui a renforcé sa capacité grâce à l’éolien en mer du Nord ces dernières années. Nous allons mettre du temps, mais nous allons y arriver », conclut-elle.
Léa Vandeputte
L’exemple d’une ferme d’éoliennes flottantes au sud de la Bretagne
Un projet pilote de ferme d’éoliennes flottantes est en cours au sud de la Bretagne, entre les îles de Groix et de Belle-Île-en-Mer. Les trois éoliennes vont être fixées sur un flotteur à moitié immergé et arrimé au fond de la mer – selon la même technique que celle utilisée par les plateformes pétrolières – et seront raccordées à la terre par un câble sous-marin. La turbine sélectionnée pour ce projet aura une puissance de 9,5 mégawatts. L’objectif de cette expérimentation est de tester en conditions réelles le fonctionnement de l’éolien flottant. Les travaux d’implantation, initialement prévus pour 2019, devraient finalement démarrer en 2021, pour une mise en service en 2022.