La peau est l’un des organes les plus surprenants du corps humain. Composée de deux milliards de cellules, elle se renouvelle en totalité toutes les 4 à 6 semaines et nous cache encore beaucoup de choses. Plus qu’une simple enveloppe protectrice, elle représente notre identité et nous la façonnons à notre image. Elle assume divers rôles pour notre santé physique et mentale, nous préservant des agressions extérieures. Explorons ce lien essentiel entre notre organisme et notre environnement.
À fleur de peau : comprendre son rôle
Malgré son importance indéniable, la peau demeure un organe mal compris… car, oui, la peau est un organe à part entière ! Bien plus qu’une simple enveloppe externe, elle est composée de trois couches finement organisées, l’épiderme, le derme et l’hypoderme (voir l’infographie ci-dessous). Cela fait d’elle le premier rempart pour protéger l’organisme des agressions extérieures. La principale d’entre elles est le rayonnement du soleil. Les UVB et les UVA sont dévastateurs pour notre corps. L’exposition excessive au soleil est responsable de 80 % des cancers cutanés*. La peau joue en effet un rôle important dans la synthèse de la mélanine, le premier rempart nous protégeant des rayonnements solaires.
Elle permet également de synthétiser la vitamine D, primordiale pour la santé osseuse et le bon fonctionnement immunitaire. Et ce n’est pas tout : notre enveloppe corporelle nous protège aussi des multiples invasions et infections du quotidien, grâce à ses cellules sentinelles et immunitaires. Les globules blancs tels que les macrophages ou les lymphocytes défendent le corps contre les micro-agressions mais préviennent aussi des allergies en détectant au préalable toutes les substances allergènes avec lesquelles on peut entrer en contact. Enfin, la peau nous protège des infections et des modifications de l’environnement, comme les variations de température et d’humidité, et nous aide à lutter contre la déshydratation. Le saviez-vous ? Cet organe nous permet également de communiquer avec le monde qui nous entoure…
Ce que la peau veut nous dire
La peau est le reflet de nos émotions. En effet, elle est continuellement en interaction avec le système nerveux : elle lui fournit des informations importantes comme le toucher ou les douleurs, tandis qu’il module les différentes fonctions cutanées. Cette relation étroite explique aussi comment les émotions peuvent avoir un impact sur notre épiderme : certaines situations inconfortables peuvent créer des rougeurs, subir une émotion peut déclencher de la transpiration… Puis, parfois, cela va encore plus loin. Maladies cutanées et psychisme sont étroitement liés de bien des manières. Les problèmes de peau, tels que le psoriasis ou l’acné, peuvent être source de mal-être ou d’anxiété. Mais la relation fonctionne aussi dans l’autre sens puisque le stress (émotionnel ou physique) peut aussi devenir le déclencheur de maladies. Le docteur Fabrice Ribeaudeau, médecin dermatologue, nous en dit plus sur cette relation entre peau et émotions : « Pour un virus comme l’herpès, qui est réputé être causé par le stress, il y a des facteurs déclencheurs pour chaque patient : fatigue, soleil, cycles menstruels… ». Toutes ces situations représentent en effet des facteurs de stress pour la peau. « D’autres maladies, comme la pelade, le vitiligo ou le psoriasis, ont un terrain génétique. Mais un événement, heureux ou malheureux, dit de stress, va favoriser la poussée ».
Mille milliards de bactéries
Alors qu’elle était autrefois reléguée au second plan, la flore cutanée bénéficie d’un vrai regain d’intérêt depuis plusieurs années. Il faut dire que le microbiote de la peau évolue et se développe tout au long de la vie, pour atteindre en moyenne mille milliards de bactéries, ainsi qu’un millier d’espèces de virus, parasites et champignons. Même si on ne l’imagine pas au premier abord, ces bactéries sont un allié de poids pour la peau, lui permettant d’assurer ses fonctions correctement. Le docteur Fabrice Ribeaudeau nous rappelle que « ces germes sont là en permanence et fonctionnent en toute intelligence ». La composition du microbiote cutané est unique chez chacun. Sa quantité et sa qualité varient d’une personne à l’autre : des facteurs tels que l’âge, le sexe, le système immunitaire ou encore le pH de la peau peuvent l’impacter. « Quand tout se passe bien, qu’il n’y a pas d’agressions extérieures ou de sécheresse de la peau, il n’y a pas de déséquilibre ». Mais en cas de maladies comme l’eczéma atopique, le microbiote entre en jeu : « Il peut y avoir un déséquilibre du microbiote en faveur du staphylocoque par exemple », explique le docteur. Dans le microbiote se cache donc l’explication de plusieurs de nos maux…
La magie de la cicatrisation
Face à une coupure, une écorchure, une morsure ou une brûlure, le processus de récupération de la peau s’engage aussitôt et avec une chronologie précise. Si celui-ci peut varier selon la gravité de la plaie, il existe des étapes communes. La phase initiale consiste à déclencher la coagulation immédiate du sang pour stopper l’hémorragie (l’hémostase). Immédiatement après se déclenche l’inflammation : il s’agit d’une réponse immunitaire permettant de nettoyer la plaie et d’empêcher une infection. La première étape de la réparation démarre ensuite par la prolifération cellulaire : les cellules de la peau vont se multiplier rapidement pour remplacer les cellules endommagées. Ce processus est soutenu par le collagène, une protéine qui renforce la structure de la peau. Dans les jours qui suivent, la formation d’un tissu cicatriciel débute, permettant de combler la zone lésée (le remodelage de la peau). Cette phase est la plus importante pour restaurer l’intégrité de la peau. Mais le résultat peut varier en fonction de divers facteurs, comme la profondeur de la blessure et les soins prodigués. Par la suite, la maturation de la cicatrice se poursuit. Cela peut durer plusieurs mois – selon la gravité de la plaie – avant qu’elle atteigne une stabilité structurelle optimale. Il est essentiel de bien protéger la zone en réparation. Si la blessure est très large, il est nécessaire de la protéger du soleil pendant l’année qui suit afin d’éviter que la cicatrice ne reste marquée à vie.
Pas tous égaux face au vieillissement
La peau est le premier support d’identité. De par son bronzage, ses tatouages, ses piercings, le maquillage ou encore les émotions qu’elle laisse voir, nous devinons la position sociale et le mode de vie de l’individu. La peau révèle ainsi beaucoup de choses malgré nous… Et surtout, notre âge. En effet, nous subissons un processus naturel de vieillissement au fil du temps : avec l’âge, la production de collagène et d’élastine diminue. Il s’agit de protéines très importantes pour une bonne structure et une bonne élasticité de la peau, dont la diminution entraîne une peau moins ferme. Mais certaines personnes semblent vieillir plus rapidement que d’autres. Pourquoi ne sommes-nous pas tous égaux face à l’âge ? Il faut savoir que le vieillissement cutané est provoqué par une combinaison complexe de facteurs génétiques et environnementaux. Notre mode de vie influe grandement sur le vieillissement de la peau. Est-ce possible alors d’agir dessus ? Se protéger des rayons ultraviolets du soleil est un premier geste quotidien à adopter pour réduire les signes de vieillissement (voir ci-dessous). En effet, ces rayons ont des effets négatifs sur le collagène et l’ADN des cellules cutanées. Ce n’est pas tout : une alimentation équilibrée et riche en vitamines favorise la santé de la peau. N’oublions pas non plus que notre peau reflète notre rythme de vie. Par exemple, un manque de sommeil peut rester marqué sur notre visage. « Le stress au quotidien, au travail, les émotions négatives, tout cela a un effet sur la peau, un véritable impact. Car elle reflète nos émotions », rappelle le dermatologue. Une bonne hygiène de vie, lutter contre le stress et penser à notre bien-être est donc crucial pour préserver cette enveloppe vitale.
*Source : Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).
Dossier rédigé par Justine Ferrari
Le tatouage : quel risque pour la peau ?
Afficher un tatouage n’est plus surprenant aujourd’hui : 18 % de la population française serait tatouée. Mais on entend beaucoup de stéréotypes concernant les dangers potentiels de cette pratique. Quels sont-ils réellement ? Selon le dermatologue Fabrice Ribeaudeau, les risques ne se trouvent pas dans les encres : « On n’a pas trouvé de risque particulier à un tatouage bien fait », précise-t-il, bien que des études soient encore en cours sur le sujet. Les problèmes potentiels se trouvent sous le tatouage. « Même si le tatoueur respecte les grains de beauté, des taches peuvent apparaître sous le tatouage et empêcher la surveillance », détaille-t-il. Les pigments foncés sont donc susceptibles de cacher une lésion cutanée en développement, pouvant entraîner un retard de diagnostic du cancer de la peau. Si cela reste rare, il est important d’y faire attention. Dans son cabinet, le dermatologue pratique le détatouage : « On a environ un patient sur dix qui souhaite se faire détatouer », précise-t-il. « Si on me demande un conseil avant un tatouage, je réponds donc de faire en sorte que le tatouage soit le plus petit possible. »
Le soleil, l’ennemi numéro 1
Le soleil est un véritable danger pour l’être humain. Il émet des rayons ultraviolets (UV), en particulier les UVB, qui pénètrent la couche externe de la peau. Lorsque l’on s’expose de manière excessive à ces rayons, l’épiderme subit des dommages cellulaires importants, pouvant entraîner des mutations génétiques ou des maladies telles que le cancer de la peau.
Le docteur Fabrice Ribeaudeau rappelle que les facteurs de risques de cette maladie dépendent de chaque individu et qu’il convient de les connaître : « Les facteurs de risques de mélanome sont bien identifiés. Les risques se classent en fonction du type et de la couleur de peau (les phototypes 1 et 2 sont les plus à risques), des antécédents personnels, le terrain familial (plus de trois cas dans la famille), du nombre de gros grains de beauté (plus de 40), des médicaments qui peuvent réduire les défenses immunitaires et du temps passé au soleil », détaille-t-il. Avec un ou plusieurs facteurs de risques, se protéger est d’autant plus essentiel : en dehors de la crème solaire indice 50 à renouveler toutes les deux heures passées au soleil, la meilleure protection reste vestimentaire. « Beaucoup de patients, quand on leur demande s’ils s’exposent beaucoup au soleil, ne pensent qu’à la plage. Mais on est exposé dès qu’on est dehors : les jardins, les activités sportives, les loisirs… »
Si l’on est une personne à risque, il faut savoir que le seul « dépistage » possible du cancer de la peau est l’examen visuel. Il est donc important de s’examiner la peau régulièrement : « Il est fondamental de s’auto-examiner, de regarder partout, particulièrement les zones les plus exposées. Toute tache suspecte, qui est nouvelle, qui s’étale, grandit, aux contours flous et qui ne fait pas mal doit être surveillée et montrée à un médecin ».