Quels liens entre démographie et changement climatique ?

Quel rôle joue l’évolution de la taille et de la structure de la population européenne sur le changement climatique ? C’est à cette question complexe qu’une nouvelle étude essaie de répondre.

Le sujet du changement climatique est au cœur des préoccupations et l’augmentation du nombre d’êtres humains sur la planète est souvent présentée comme responsable. Mais qu’en est-il vraiment ? Pour le savoir, des chercheurs de l’Institut national d’études démographiques (Ined) ont analysé les relations entre démographie et changement climatique dans l’Union européenne et ont publié leurs résultats dans l’édition de septembre du bulletin Populations & Sociétés.

La taille de la population n’est pas l’unique cause du réchauffement climatique

Contrairement à une idée reçue encore largement répandue, l’Ined l’affirme : « La croissance de la population n’est pas le facteur principal des émissions futures ». En effet, les pays de l’Union européenne demeurent les plus grands émetteurs de CO2, et ce malgré une faible croissance voire une stagnation de leur population. Leurs « émissions par habitant restent nettement plus élevées que dans le reste du monde », précise l’institution. À l’inverse, en Afrique, où la croissance démographique est importante et où les taux de fécondité sont élevés, les émissions par habitant sont relativement faibles. « Ces pays ne sont responsables que d’une part minime des émissions mondiales passées », confirme l’Ined. Les auteurs estiment que « c’est le verdissement de l’économie de l’Europe et des autres grands pays émetteurs qui constitue le principal levier de réduction des émissions mondiales de CO2 à l’horizon 2050 ».

La démographie agit sur le climat… et inversement

Il n’en demeure pas moins que « la démographie et le changement climatique interagissent de façon complexe ». « D’une part, la taille et la structure de la population influencent les émissions de CO2, expliquent-ils. D’autre part, le changement climatique affecte les dynamiques de population (migrations, fécondité, mortalité). » C’est pour cela qu’il est important de prendre en compte les caractéristiques de la population dans l’élaboration des politiques publiques et des stratégies d’adaptation face au réchauffement climatique.

Les émissions de CO2 augmentent avec l’âge

Parmi ces caractéristiques, l’Ined souligne l’impact du vieillissement de la population. À l’échelon du ménage, les émissions de CO2 augmentent avec l’âge de la personne de référence et « atteignent un pic entre 45 et 49 ans » avant de diminuer progressivement. Mais à l’échelle individuelle, le point culminant se décale pour se situer aux alentours des 75 ans. Deux raisons expliquent ce phénomène : les personnes âgées ne bénéficient pas « des économies d’échelle propres aux ménages nombreux » et elles « concentrent leurs dépenses dans des biens de consommation à forte intensité carbone (besoin en santé accru, logement plus ancien, lieu de résidence, etc.) ». « Compte tenu du vieillissement démographique, la part des émissions imputables aux personnes âgées devraient donc augmenter dans les années à venir », constate l’Ined.

Autre caractéristique mise au jour par les auteurs de l’étude : l’incidence du lieu de résidence. En milieu urbain, les logements moins spacieux et les infrastructures disponibles comme les transports en commun permettent de réduire les pollutions. « En revanche, les revenus des citadins, souvent plus élevés, encouragent la consommation et augmentent donc leurs émissions », tempère l’Ined.

Une perception différente du changement climatique

Comme c’est le cas pour les émissions, les caractéristiques sociodémographiques ont aussi un effet sur la perception du changement climatique. Ainsi, les jeunes et les personnes ayant un niveau d’instruction élevé y sont plus sensibles. À titre d’exemple, 21 % des 15-29 ans estiment qu’il s’agit du « problème le plus grave pour le monde », contre 16 % des plus de 60 ans et 25 % des diplômés du supérieur contre 10 % des individus ayant un niveau d’instruction primaire.

« Les caractéristiques sociodémographiques telles que le niveau d’instruction, l’âge, et le lieu de résidence, orientent incontestablement les comportements individuels et les attitudes à l’égard du changement climatique », considère l’Institut. « Les politiques climatiques doivent en tenir compte », conclut-il.

© C i E M / Léa Vandeputte


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