Il est le plus long du corps : le nerf vague part du cerveau pour rejoindre l’abdomen, en passant par le cou, et joue de nombreux rôles dans le domaine cardiaque, pulmonaire et digestif notamment. Les précisions du Pr Bruno Bonaz, spécialiste de la question.
Appelé aussi nerf pneumogastrique, le nerf vague est le dixième nerf crânien. « Il part du bulbe rachidien, descend au niveau du cou, traverse le médiastin et se termine au niveau de l’abdomen. C’est le nerf le plus long de l’organisme », explique le Pr Bruno Bonaz, professeur de gastro-entérologie et membre d’une équipe de recherche à l’Institut des neurosciences de Grenoble (Inserm U1216). Au cours de son trajet dans le corps, le nerf vague se segmente en plusieurs branches innervant de nombreux organes : il possède donc des branches cervicales, thoraciques et abdominales. C’est un nerf mixte. « Il contient 80 % de fibres « afférentes » c’est-à-dire qu’elles informent le cerveau de ce qui se passe dans le cœur, les poumons ou le tube digestif. Les 20 % restants sont des fibres « efférentes ». Elles partent du cerveau et descendent dans le nerf vague pour se diriger vers la périphérie », détaille le Pr Bonaz. Le nerf vague joue un rôle essentiel dans de nombreux domaines. « Il régule la sécrétion acide de l’estomac et la motricité du tube digestif. Il a aussi un rôle concernant la fréquence cardiaque, certaines sécrétions hormonales et la respiration », précise le professeur. Le nerf vague possède aussi une activité importante liée au système nerveux autonome ou végétatif. Il a un rôle antidépresseur, antiépileptique et anti-inflammatoire notamment. Des pathologies aussi bien cardiaques, pulmonaires qu’auto-immunes sont caractérisées par des anomalies de fonctionnement du nerf vague. « Les malades ont une dysautonomie, c’est-à-dire que leur système nerveux autonome ne fonctionne pas correctement. De nombreuses pathologies sont caractérisées par un système sympathique hypertonique et un nerf vague hypotonique. Le stress qu’il soit psychologique ou immunitaire a tendance à inhiber le nerf vague et à stimuler le système nerveux sympathique », souligne le Pr Bonaz.
Des maladies digestives traitées par la stimulation du nerf vague
Utilisée depuis plus de vingt ans pour traiter l’épilepsie et la dépression, la stimulation du nerf vague permet désormais également de réduire les troubles autistiques ou d’améliorer la récupération motrice après un accident vasculaire cérébral (AVC). Le Pr Bruno Bonaz a, quant à lui, beaucoup travaillé sur les interactions entre le stress et les problèmes digestifs. « Les efférences vagales (les fibres qui partent du cerveau pour agir sur la périphérie en passant par le nerf vague) ont un effet anti-inflammatoire et plus particulièrement anti-TNF. Or, le TNF (une cytokine pro-inflammatoire) est impliqué dans la maladie de Crohn, la rectocolite ou encore la polyarthrite rhumatoïde. En 2012, nous avons débuté une étude pilote basée sur la neurostimulation vagale invasive de neuf patients qui souffraient d’une maladie de Crohn modérée. Ses résultats ont montré que les symptômes d’environ 60 % des patients étaient améliorés. Nous avons aussi réalisé une étude pilote portant sur le syndrome de l’intestin irritable (anciennement dénommé colopathie fonctionnelle) car le nerf vague peut avoir une action antidouleur », dévoile le spécialiste. « Actuellement des équipes de recherche clinique utilisent la neurostimulation vagale transcutanée auriculaire pour traiter des malades, enfants et adultes, souffrant de rectocolite ou de la maladie de Crohn. D’autres équipes utilisent la même technique pour lutter contre l’obésité ou la polyarthrite rhumatoïde », précise-t-il avant d’ajouter que la neurostimulation du nerf vague a beaucoup d’avenir !
© C i E M / Violaine Chatal