On l’appelle l’asthme ou l’eczéma de l’œsophage. L’œsophagite à éosinophiles est une maladie allergique de l’œsophage à laquelle les médecins vont devoir penser car de plus en plus courante, chez les adultes comme les enfants.
Décrite dans les années 1990, l’œsophagite à éosinophiles est une maladie récente qui voit son incidence augmenter. « Il s’agit d’une maladie inflammatoire chronique, évolutive, dans un contexte où l’on retrouve des problèmes d’immunité, détaille Anaïs Lemoine, pédiatre (Hôpital Trousseau-APHP, Paris). Les causes de la maladie dépendent de toute une série de facteurs, en particulier environnementaux (exposition à des allergènes), cellulaires et immunitaires avec, en toile de fond, une susceptibilité génétique. » Plus rare chez l’enfant que chez l’adulte, la prévalence pédiatrique annuelle est néanmoins estimée entre 22 et 49/100 000 enfants/an.
Trop de globules blancs dans l’œsophage
La maladie consiste en l’infiltration de la paroi de l’œsophage par une grande quantité d’éosinophiles, endroit où ils seraient normalement absents. Les éosinophiles sont un type de globules blancs qui circulent dans le sang, composante normale du système immunitaire. En présence d’un déclencheur comme des allergies ou une infection, les éosinophiles se multiplient et deviennent actifs pour débarrasser l’organisme des pathogènes. Certains tissus et organes du corps (œsophage, estomac, intestin grêle, voire côlon), sont habitués à la présence d’éosinophiles. Toutefois, un état pathologique peut se développer lorsque les éosinophiles se retrouvent là où ils n’y sont pas normalement de façon continue, entretenant une inflammation chronique. L’infiltration et l’inflammation prolongées des tissus peuvent nuire à la fonction de l’organe touché. En l’occurrence, seul le diagnostic précoce de la maladie, idéalement dès l’enfance, pourrait limiter la progression vers des complications au niveau de l’œsophage et surtout éviter son rétrécissement. À cette fin, l’endoscopie digestive haute (ou fibroscopie) assortie de biopsies est l’examen de référence pour poser le diagnostic. Ensuite, l’analyse des tissus prélevés permet de définir le niveau d’infiltration de la muqueuse en éosinophiles. Quant au bilan allergologique, « celui-ci est recommandé en cas d’antécédents familiaux d’atopie, fait remarquer le Dr Lemoine, et lorsqu’une allergie alimentaire immédiate est suspectée. Les tests allergologiques à effectuer seront alors orientés par l’enquête allergologique. »
Plusieurs spécialistes sont impliqués dans la prise en charge de l’œsophagite à éosinophiles comme le gastro-entérologue ou le gastropédiatre, l’allergologue, l’anatomopathologiste, le médecin généraliste et le diététicien. Les traitements proposés sont les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP), des médicaments souvent efficaces, bien connus dans le reflux gastro-œsophagien. En cas d’échec, les corticoïdes topiques sont recommandés, dont les corticoïdes inhalés déglutis et le budésonide visqueux. « Leur efficacité est de l’ordre de 65 %, souligne la pédiatre. Une forme orodispersible de budésonide est disponible en France depuis 2022 mais sans autorisation chez l’enfant pour l’instant. » Si l’amélioration laisse à désirer, les régimes d’éviction alimentaire peuvent être entrepris. Enfin, si aucun des traitements précédents n’est satisfaisant, une nouvelle biothérapie (dupilumab) s’est révélée efficace chez l’adulte. L’autorisation de mise sur le marché (AMM) chez l’enfant n’est pas d’actualité.
© C i E M / Hélène Joubert