Il y a à peine vingt ans, qui aurait imaginé pouvoir consulter son généraliste par écrans interposés ? Depuis la crise sanitaire du Covid-19, qui a donné un énorme coup d’accélérateur à la téléconsultation, la télémédecine est bel et bien entrée dans les mœurs. Petit retour en arrière…
XVIIIe siècle : la téléconsultation… épistolaire
Autres temps, autres mœurs… Il était courant, au XVIIIe siècle, d’échanger par lettres avec son médecin. Le patient décrivait ses symptômes, le praticien lui envoyait en retour un avis, un diagnostic, des indications et des remèdes. Seuls les patients sachant lire et écrire pouvaient alors avoir recours à ces consultations à distance. Ces dernières ne concernaient pas toutes les pathologies, car il fallait parfois compter plusieurs jours avant de recevoir la réponse du médecin. Les longues maladies, surtout, faisaient l’objet de ce type de demande. Cette pratique tombera petit à petit en désuétude et finira par disparaître vers 1820-1840.
Années 1960-70 : les États-Unis pionniers
L’histoire de la télémédecine débute dans les années 1960 aux États-Unis, notamment avec la mise en réseau de programmes de téléconsultation et de télééducation autour du Nebraska Psychiatric Institute. En 1965 a lieu la première visioconférence en chirurgie cardiaque entre les États-Unis et la Suisse. En 1973, le premier congrès international sur la télémédecine dans l’État du Michigan est à l’origine du lancement de nombreux projets. Dans les années 1970, la Nasa développe des programmes de télémédecine pour ses astronautes, et l’armée américaine des systèmes de téléassistance pour apporter les premiers secours aux blessés sur les champs de bataille lors de la guerre du Vietnam.
1989 : création de l’Institut européen de télémédecine
L’Institut européen de télémédecine voit le jour en 1989, à Toulouse, à l’initiative du professeur Louis Lareng, qui consacrera toute sa carrière à la télémédecine. Il fut également le fondateur du Samu, créé le 16 juillet 1968.
1994 : naissance de l’Institut européen de téléchirurgie
L’Institut européen de téléchirurgie est créé, toujours à Toulouse. Les projets nationaux concernent la formation aux techniques nouvelles en chirurgie, la médecine en milieu carcéral et, surtout, périnatale et d’urgence. Des réseaux interrégionaux multidisciplinaires commencent à se développer.
2009 : un cadre juridique
Le 21 juillet 2009, la loi Hôpital, patient, santé et territoire (HPST) donne pour la première fois, en France, un cadre juridique et une définition à la télémédecine. Elle distingue cinq actes de télémédecine (voir encadré), qui sont aujourd’hui pris en charge par l’Assurance maladie.
2011 : cinq priorités nationales
Le 8 juin 2011, le Conseil des ministres fait reposer le développement de la télémédecine en France sur une stratégie définie selon cinq priorités nationales. Elles devront être déclinées sur le plan local par les agences régionales de santé (ARS) dans un programme obligatoire régional de télémédecine. Ces cinq domaines d’intervention prioritaires sont la permanence des soins en imagerie médicale, la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux (AVC), la santé des personnes détenues, la prise en charge de maladies chroniques (insuffisance rénale chronique, insuffisance cardiaque, diabète, etc.) et, enfin, les soins en structure médico-sociale ou en hospitalisation à domicile. La stratégie nationale de déploiement de la télémédecine est pilotée par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS).
2018 : la télémédecine enfin remboursée
La dernière avancée date du 15 septembre 2018, avec l’entrée de la téléconsultation dans le droit commun. Désormais, celle-ci devient accessible, après 10 ans d’expérimentations, sur l’ensemble du territoire en France : tout médecin, quelle que soit sa spécialité, peut alors proposer à ses patients de réaliser une consultation à distance au lieu d’une consultation en présentiel pour toute situation médicale qu’il jugera adaptée. Les tarifs et modalités sont identiques à ceux des consultations en cabinet (de 25 à 30 euros dans la majorité des cas). Cet accord signe une avancée majeure, en inscrivant ces nouvelles pratiques comme une réalité quotidienne en France. Dans ce cadre, et dans un second temps, la téléexpertise est déployée à partir de février 2019, permettant à un médecin de solliciter l’avis d’un confrère face à une situation médicale donnée.
© C i E M / Isabelle Coston
Télémédecine : de quoi parle-t-on ?
La télémédecine englobe toutes les pratiques médicales réalisables à distance par le biais des technologies de l’information et de la communication.
- Parmi les actes de télémédecine reconnus par la loi figurent :
- la téléconsultation ;
- la téléexpertise (le médecin sollicite à distance l’avis d’un spécialiste) ;
- la télésurveillance médicale (l’enregistrement et la transmission des données peuvent être automatisés ou réalisés par le patient lui-même ou un professionnel de santé) ;
- la téléassistance (un professionnel médical assiste à distance un confrère lors de la réalisation d’un acte) ;
- la réponse médicale urgente apportée dans le cadre des activités de régulation Samu-Centre 15.
La télémédecine facilite l’accès aux soins, notamment dans certaines régions rurales, où l’hôpital le plus proche se trouve parfois à plusieurs dizaines de kilomètres. Dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les soignants assistent le patient, examiné à distance par le spécialiste d’un service hospitalier, leur épargnant l’hospitalisation et des trajets éprouvants.
En 2020, la téléconsultation a été multipliée par 3 pour les patients et par 5 pour les médecins*
* Source : Baromètre Odoxa/Agence du numérique en santé (ANS)