Les additifs émulsifiants, très utilisés par l’industrie agroalimentaire, présentent un risque accru de développer du diabète de type 2. C’est le résultat d’une étude menée via la plateforme Nutrinet-santé.
Il existe « des associations directes entre le risque de diabète de type 2 et l’exposition à divers émulsifiants d’additifs alimentaires largement utilisés dans les aliments industriels ». C’est la conclusion d’une étude menée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), publiée dans la revue médicale Lancet Diabetes & Endocrinology.
Les dangers de l’ultra-transformé
Les auteurs de l’étude se sont concentrés sur les effets à long terme de ces émulsifiants, présents dans une majorité de plats vendus par la grande distribution et souvent ultra-transformés. Les additifs émulsifiants sont, effectivement, utilisés pour améliorer le goût, l’apparence ou la durée de conservation de nombreux produits comme les pâtisseries, les yaourts, les glaces ou les plats préparés.
L’équipe de chercheurs a également pris en compte les principaux facteurs de risque du diabète comme l’âge, le sexe, l’obésité, l’alcool ou le tabagisme, ainsi que les antécédents familiaux. Et elle a aussi évalué le niveau d’activité physique et la qualité nutritionnelle des aliments consommés par les participants, en veillant particulièrement à leur apport en sucre.
Une étude à grande échelle
Les résultats s’appuient sur un échantillon particulièrement conséquent de 104 139 personnes qui ont participé à la grande enquête en ligne sur le lien entre santé et nutrition Nutrinet-santé. Concrètement, les participants ont été invités à répondre à des questionnaires et à renseigner leurs habitudes alimentaires sur une plateforme, tous les six mois, durant 14 ans. Il est à noter que 79 % des participants était des femmes, avec un âge moyen de 43 ans.
Les chercheurs ont extrait de cette masse d’informations des données quantitatives, afin de calculer le degré d’exposition chronique aux différents émulsifiants, sur un temps long. Ils ont ainsi confirmé l’association à un risque accru de diabète. Parmi les émulsifiants considérés comme nocifs, le citrate de sodium, le phosphate tripotassique, le carraghénanes et les gommes arabique et xanthane sont notamment cités.
Les recherches ne font que commencer
Dans son communiqué, l’Inserm se félicite d’une « taille d’échantillon considérable », et d’avoir « pris en compte un grand nombre de facteurs susceptibles d’induire des biais de confusion ». Mais l’Institut se montre tout de même prudent. « Ces résultats sont issus d’une seule étude observationnelle pour le moment et ne permettent pas à eux seuls d’établir un lien de cause à effet, estiment Mathilde Touvier et Bernard Srour, les principaux auteurs de l’étude. Ils doivent être reproduits dans d’autres études épidémiologiques à travers le monde, et complétés par des études expérimentales toxicologiques et interventionnelles, pour éclairer davantage les mécanismes liant ces additifs émulsifiants et la survenue du diabète de type 2. » Les chercheurs pointent aussi du doigt plusieurs biais au sein de leur travail, notamment la sur-représentation des femmes et le haut niveau d’étude des participants, pour beaucoup déjà sensibilisé à l’importance des produits frais et d’une alimentation saine.
Les travaux de l’Inserm sur la question ne vont pas s’arrêter là, puisque de nouvelles recherches, notamment avec des toxicologues, seront bientôt menées, pour mesurer l’impact de ces additifs sur le corps. Les scientifiques s’intéressent par ailleurs à la question des « effets cocktails ». Ils vont ainsi se pencher sur les « variations de certains marqueurs sanguins et du microbiote intestinal en lien avec la consommation de ces additifs, pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents ».
© C i E M / Mathieu Yerle