Besoin permanent d’être aimé et rassuré, la dépendance affective peut devenir handicapante. Quelles sont ses causes, ses manifestations et comment en venir à bout ? Réponses et conseils d’une psychologue.
« Privée de l’attention de mes parents commerçants quand j’étais enfant, je me suis mariée très jeune, persuadée que j’avais rencontré l’âme sœur. Mais j’ai rapidement découvert que mon mari privilégiait sa carrière à notre vie de couple. Face à ce que je considérais comme de l’indifférence, j’ai développé une véritable dépression » explique Véronique, 45 ans, qui a découvert sur le tard qu’elle souffrait de dépendance affective.
Ce trouble de la personnalité concerne de nombreux Français, sans distinction entre les hommes et les femmes. « La dépendance affective se manifeste quand la relation devient une source de souffrance alors que, par essence, c’est une source de joie et d’épanouissement », explique Gwenaëlle Persiaux, psychologue clinicienne spécialisée dans les blessures d’attachement et auteure des ouvrages Guérir des blessures d’attachement et Coupé des autres, coupé de soi (éditions Eyrolles). Elle trouve souvent son origine dans l’enfance. Elle est liée à un manque de sécurité qui perturbe l’équilibre et l’échange avec le ou la partenaire. « Le plus souvent les personnes dépendantes affectives n’ont pas pu développer un attachement suffisamment « secure » pour se sentir assez bien quand elles sont seules. C’est la raison pour laquelle elles ont besoin d’un autre pour les soutenir, les faire se sentir exister. Sans l’autre, elles se sentent perdues, confuses, incapables », analyse Gwenaëlle Persiaux.
Anxiété relationnelle et manque d’estime de soi
La dépendance affective prend différents visages. Sa principale manifestation est l’anxiété relationnelle. « L’autre occupe beaucoup l’esprit de la personne dépendante affective, qui a une insatisfaction permanente et qui envoie à son partenaire de nombreux SMS ou l’appelle souvent au téléphone », explique Gwenaëlle Persiaux, qui évoque aussi une jalousie excessive et un désir d’exclusivité. Autres manifestations, le manque d’estime de soi et la comparaison fréquente avec d’autres personnes. Des symptômes qui empirent lors d’une rupture. « Peuvent alors apparaître des symptômes anxieux ou dépressifs, comme des crises d’angoisse, des troubles obsessionnels compulsifs (TOC), des phobies, une dépression, des compulsions alimentaires ou autres (drogues, alcool) », note Gwenaëlle Persiaux.
Heureusement, il est possible de vaincre la dépendance affective. Mais la plupart de ceux qui en souffrent n’en ont pas conscience. Une psychothérapie et, au besoin, un traitement pharmacologique peuvent leur permettre de comprendre et de gérer leur handicap sentimental. « Mais, par soi-même, on peut aussi réparer beaucoup de choses. En auto-soin, il y a un cercle vertueux à mettre en place, qui consiste à retrouver de l’autonomie et la capacité à faire et à être seul, mais aussi à faire preuve de compréhension et de douceur avec la partie de soi qui a été blessée et qui est devenue dépendante », conseille Gwenaëlle Persiaux. Ce travail sur l’affirmation et l’autonomie est un petit, mais ô combien important, pas vers l’amour de soi !
Quelle différence avec la passion ?
Si la passion est souvent exclusive et exigeante, elle n’est pas comparable avec la dépendance affective. Ainsi, les dépendants affectifs ne sont jamais satisfaits de ce que leur partenaire leur donne, alors que les personnes concernées par la passion ne sont frustrées que par l’éloignement. Les dépendants affectifs espèrent recevoir autant d’attention qu’ils en donnent, mais ce besoin n’est jamais assouvi. Frustrés, ils peuvent devenir aigris voire désagréables et parfois même cruels à leurs dépens.
© C i E M / Violaine Chatal